Le vote salafiste est-il un vote contestataire ?

Caricature anti-salafiste (Al Ahram Weekly)
Le vote salafiste (parti Al Nour principalement) s'élève à 20% dans le premier des trois stages des élections du Conseil Populaire égyptien (chambre basse). Ce résultat a étonné plus d’un Égyptien et la plupart des observateurs et diplomates occidentaux.

Les élections et la démocratie sont principalement une question de représentation et le parti salafiste représente une grosse partie de la population égyptienne et tend à réduire le gouffre entre la population égyptienne et l’élite. Le taux de pauvreté dans le pays (sur base du taux de la population vivant avec moins de 1 dollar par jour – il est passé à deux euros par jour-, chiffres officiels en 2010) est de 20%. L’indice de développement humain place l’Egypte à la 113e place mondiale sur 187. Pour le dire simplement, les conditions socio-économiques en Egypte sont épouvantables. Une "élite" est scandaleusement riche tandis qu'une masse incalculable se déchire quotidiennement pour rendre des services à 1 dollar de l'heure lorsque l'on veut bien leur demander. La plupart des observateurs estiment que 20% d'ultra-pauvres et 20% de vote salafiste, le compte y est. Il faudra quand même expliquer ces résultats plus en détail, on pourrait être surpris. 

Mais partons de l'hypothèse que cette équation est correcte. Les cheikhs salafistes, comme les Frères Musulmans, ont une longue tradition de services sociaux, de fourniture de nourriture et de médicaments pour les nécessiteux. Les électeurs pensent que, une fois au parlement, les élus de ces partis auront encore plus de moyens pour aider les pauvres.

Contrairement à tous les autres partis, y compris le Parti de la Liberté et de la Justice (Frères Musulmans), les membres du parti Al Nour veulent présenter une approche de bas en haut. Par exemple et en comparaison, les cadres des Frères Musulmans sont issus des classes moyennes et peuvent avoir une attitude condescendante vis-à-vis des populations les plus pauvres. Les cadres du parti salafiste se présentent comme les réels garants aptes à parler au nom de ces segments de la population, sans présenter pour autant un discours révolutionnaire au sens social du terme, bien au contraire. 

Le discours du parti Nour est plutôt anti-démocratique. Certains de ses représentants ont déclaré que la démocratie était un système hérétique, tout en se portant candidat aux élections. Une élection démocratique a ceci de particulier de ce qu'elle permet à des personnes qui y sont opposées d'être élues. L'enjeu sera de voir si les partis démocratiques trouveront un intérêt suffisant à résoudre les problèmes de cette grosse partie de la population votant pour des partis anti-démocratiques ou si, comme par exemple en Europe, la plupart des partis s'en accommoderont. 

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